SUZANNE NIQUILLE

Artisite Peintre

Philosophie:

L’œuvre ne vient pas de moi. Lorsque nait le geste je ne puis affirmer si c’est l’émotion présente qui vient de l’esquisser ou si le geste lui-même vient de créer l’émotion. En créant j’ignore où je vais, je ne peux qu’observer le mouvement de la Vie en moi ; c’est lui qui rythme mon travail et c’est ainsi que l`œuvre advient au travers le la manifestation subtile de mes zones d’ombre et de lumière. Je ne crée rien c’est l’œuvre qui me crée, elle me conduit vers elle.

 

La vie est un grand mouvement de liberté, source inépuisable de créativité. Créer, c’est accepter la vacuité dans laquelle le geste arrive, car il ne vient de nulle part me faisant parfois la grâce de se poser ou bien retournant à l’infini. Mais c’est lorsqu’il se pose de lui-même, dans un élan de pure spontanéité, qu’il devient juste et peut en entrainer un autre qui, à son tour, se posera en accord parfait avec le précédent. Alors, de tout ce mouvement, nait peu à peu l’harmonie des formes et des couleurs qui n’est jamais mon œuvre personnelle puisque je l’ai volée à un morceau d’éternité.

 

Sculpter est une émotion qui voudrait s’incarner dans la terre.  Elle accompagne mon  geste ou c’est le geste qui contrarie son désir de pénétrer la matière, donnant ainsi naissance à cette lutte créatrice qui me contraint à ne pas m’égarer, mais à rester présente à cette force déterminée à se laisser capturer, pétrir, déchirer, enfermer. Lorsque le calme apparaît enfin, je sais que l’œuvre est complète. Alors peut commencer le travail de finition qui permet d’exhaler le sens subtil de l’ouvrage.

 

Une fois posée l’intention du projet, lorsque je pénètre au cœur du travail, la pensée n’a plus de place sauf celle de soutenir le projet. Seule avec mon matériel, je trace, je forme et je déforme, les yeux grands ouverts sur le vide. Les couleurs m’appellent pour être étalées sur la toile, la matière m’indique le mouvement à donner, chaque geste est adéquate si je l’exécute dans la spontanéité de l’instant où il nait ; le temps est absent, l’espace est infini ; je m’abandonne au vertige du vide et c’est pour ces moments là que je crée.  

 

Texte de Suzanne Niquille / Tout droit de reproduction soumis à son accord